L'antisportive frustrée (billet moche)
Par le sport, l'homme se libère de lui même. Il a bien de la chance. Je ne suis pas une sportive, pas une compétitrice. Je ne sais pas me vider l'esprit et compter sur mes seules ressources corporelles. Je ne sais pas me délester de mes soucis pour goûter une cession intense de dépassement de mes capacités physiques, pour le seul plaisir de l'effort, de la lutte, ou même du jeu. Je trouve que le "sport pour le sport" est un temps perdu, un temps superflu et même creux. C'est probablement seulement un temps que je n'ai pas appris à aimer, à connaître. J'admire certains amis qui se lèvent à l'aube et le sourire aux lèvres à l'idée de leur journée sportive. Je sais aussi à quel point je me sentirais ridicule sur des skis alpins, ridicule sur un vélo de compétition. Tellement pas à ma place. J'ai envie d'apprendre à danser le folk depuis plus d'années que n'en comptent les doigts de ma main, mais je n'ose pas me lancer. J'ai envie de balades tranquilles dans la neige avec ou sans raquettes. J'ai envie de ski de fond dans les traces, juste pour l'osmose avec les éléments naturels. Je ne me lance pas. Seule, je ne peux pas. J'aurai besoin d'un autre de mon acabit. Mais en Savoie nous sommes des bêtes rares, car c'est un comble : nous vivons dans une région de sportifs. Ils sont partout, coureurs, grimpeurs, skieurs, cyclistes. A chaque coin de rue ici se cache un sportif et sa famille. Et puis il y a les enfants. Je regarde les enfants de nos amis sportifs qui jubilent comme leurs parents à l'idée d'une sortie en survêtement et baskets, ou en bonnet et combinaison. Puis je me retourne doucement vers mes bambins et je les entends râler de loin, pleurnicher à l'idée de l'effort demandé. Je me dis que les balades en raquettes pour les écouter se plaindre... Alors, ce sera dans une autre vie. Ou bien quand ils seront suffisamment grands pour se garder tout seuls. En attendant, mon corps me crie de faire quelque chose, d'arrêter de rester assis devant ce pécé que je ne supporte plus. J'ai souffert à l'adolescence d'être une grenobloise qui ne savait pas skier. Alors, nous avons décidé que nos enfants apprendraient à skier. Qu'ils auraient cette chance là. Chaque samedi, ils prennent des cours. Des cours pour réparer mes incompétences et mes insuffisances.